Gastronomie italienne

Publié le samedi, 26 novembre 2011 à 10h46

La Genovese napoletana

Par Giuseppe Di Martino

Malgré son nom la Genovese n'est pas un plat de Gênes*, il s'agit plutôt d'un des plats les plus traditionnels de l’antique cuisine napolitaine, toujours préparé selon un rituel ancestral.

Sur le plan technique c’est un « ragù » (ragoût), c'est-à-dire une sauce dont la préparation est basée sur deux éléments: présence de viande et un procédé de cuisson très lent.

Mais « la Genovese » est un ragoût sans tomates. C’est la seule exception admise au « Ragù rouge » (avec tomates) selon la tradition du déjeuner dominical napolitain. Sur le plan symbolique c’est le plat de la famille enfin réunie. Autour de ce rituel gourmand, la cellule familiale se ressoudait et cela marquait les moments importants, notamment lorsque les enfants accédaient pour la première fois à la table des adultes.

La Genovese est finalement le plat que l’on partage en signe d’appartenance au « clan » familial. Chaque famille a sa propre recette secrète. La quantité et la diversité des ingrédients et des arômes varient beaucoup. Cependant, les ingrédients de base et fondamentaux sont l'oignon, la viande, les pâtes et – sans aucun doute – le rituel, qui est de prendre le temps nécessaire.

La cipolla cafona

L'oignon, encore plus que la viande est l’élément central de ce plat. Ne pas utiliser d'oignon blanc, pas plus que, d'oignon frais. Le meilleur est le « Cipolla Ramata di Montoro » (Oignon cuivré de Montoro, province de Avellino, Campania) particulièrement adapté à ces préparations caractérisées par des cuissons lentes, grâce à sa fibre résistante et durable. Cet oignon de haute qualité est doux et très aromatique, parfait pour se marier à la viande de veau. Et l'appellation “cafone” remonte au fait qu'il provenait de la campagne. Pour arriver en ville, tous les produits de la campagne devaient être hissés par une corde (« fune ») au dessus des portes qui protégeaient la ceinte urbaine de Naples.

La viande

Naples n'a pas de vraie tradition de viande (et de lait non plus). Il y en avait trop peu et elle était très difficile à trouver en période de disette. Même s’il est vrai que les recettes les plus savoureuses naissent des morceaux de viande considérés comme moins nobles (le Ragù et la Genovese en premier), ils étaient, pour autant, rares. Pour « la Genovese » le morceau le plus utilisé est le “lacierto” (“girello” en italien : le gîte). A l'époque les gens aisés préféraient l’« annecchia » (viande de veau).

Gli ziti spezzati

Le format des pâtes est immuable; on ne peut se tromper: ce sont des ziti spezzati. Les ziti sont des macaronis longs brisés (« spezzati ») à la main par les zite (« zita » = femme non mariée). Les zite étaient des femmes non mariées et plus en âge de l’être qui étaient chargées de préparer le déjeuner du dimanche pour toute la famille tandis que les jeunes filles allaient à l'église. Le rituel d’organisation du déjeuner était très long et complexe, parfois il commençait le soir du jeudi précédent. Et bien évidemment les « pleurs » des zite n'étaient pas seulement dus aux énormes quantités d'oignons à peler, mais aussi à la triste résignation des filles obligées à rester à la maison car célibataires. Cette technique de pâtes à briser était essentielle car les morceaux brisés lors de ce processus contribuent à bien amalgamer le plat. C’est un plat à manger à la fourchette et non pas à la cuillère (à Naples, la cuillère n'était pas symboliquement appréciée car c’était le couvert pour les soupes des paysans).

Vous trouverez la recette en cliquant ici !

  • L'origine du Ragù dit «alla Genovese» est incertaine. Quelqu'un retrace que son nom est dû aux marins génois qui étaient débarqués à Naples au long du XVIIIe siècle en apportant avec eux leurs traditions, la nourriture ; selon d'autres ce sont les propriétaires génois des restaurants du port du XVe siècle de Naples qui, les premiers, avaient cuit la viande dans des oignons. Les Napolitains auraient ensuite ajoutés les pâtes. (Source "La cuisine napolitaine" par Vincenzo Corrado, 1832, "La cuisine théorique et pratique" par Ippolito Cavalcanti, duc de Buonvicino, 1837).