Cosa succede in città

Publié le mercredi, 22 avril 2020 à 07h30

L'Italie raconte sa crise

Par Graziana Lucarelli

Est-il possible dans le moment historique actuel, au moment où l’Italie est ravagée, pratiquement et spirituellement, par une crise sanitaire, de parler d’autre chose que de cette crise ? Des difficultés qu’elle engendre ? Des failles de la société qu’elle soulève ? Des certitudes qu’elle remet en question ?

Nous prenons le parti pris de penser que non, cela n’est pas possible.

Ou mieux si, cela serait possible, sauf que cela nous ferait passer à côté de ce que cette crise est en train de produire en terme de réflexions, de doutes, de peurs, de regards. Ainsi, nous décidons de consacrer cet article à la valorisation des productions artistiques – écrits, vidéos, musique – qui parlent justement de cette crise, de la manière dont les italien.ne.s sont en train de la vivre, de la subir, de l’investir. Pour porter un regard sensible, plutôt qu’une analyse clinique, sur la situation en cours.

La modalité « cahier de bord » a attiré un bon nombre d’artistes. Le cahier de bord en images de l’illustrateur Zerocalcare – la série "Rebibbia Quarantine" diffusée pendant le programme Propaganda Live – raconte avec le style drôle et profond qui le caractérise sa vie et celle du quartier de Rebibbia, au nord-est de Rome.

Il est question de queues sans fin pour faire les courses au supermarché, de la possibilité (ou plutôt de l’impossibilité) de mener une vie saine pendant le confinement, de son humeur fluctuant entre une excellente maitrise de la situation et la soudaine envie d’en finir, du surinvestissement des relations sociales à distance (entre appels, visioconférences, apéros à distance…), de l’attitude de moins en moins enthousiaste vis-à-vis des personnes qui chantent sur les balcons pour se donner du courage, etc.

Plus liée à la critique sociale, la proposition de cahier de bord du collectif Wu Ming : « Diario virale. I giorni del coronavirus à Bulåggna ». En trois épisodes, ce collectif d’écrivain.e.s a raconté le début de l’épidémie à Bologne, ville du nord du l’Italie, en mettant en lumière, tout d’abord, l’évolution des réactions des habitant.e.s en termes de port des masques, relation à l’espace public, pour ensuite s’attaquer à une critique du rôle joué par les médias, les scientifiques, les hommes et les femmes politiques. Aussi, Wu Ming souligne les conséquences du confinement sur les travailleur.euse.s précaires, sur les détenu.e.s.

Un cahier de bord version podcast arrive enfin de RaiRadio3 (à écouter ici) qui diffuse la prise de conscience de Caroline, jeune femme colombienne habitant à Milan. Initialement elle a partagé ses doutes face à la possibilité de quitter la « zone rouge », pour ensuite enregistrer et diffuser ses appels et messages avec ses proches : travailleur.euse.s dans le monde du spectacle, séropositifs, volontaires auprès des sans-abris, italien.ne.s émigré.e.s dans d’autres pays, en quarantaine, enceintes, ambulancier.ère.s, philosophes. Un cahier de bord qui part de l’Italie pour, malgré tout, s’ouvrir au monde.