Cosa succede in città

Publié le jeudi, 23 janvier 2020 à 07h29

Pouvons-nous rire de la question migratoire ?

Par Graziana Lucarelli

Le nom de Checco Zalone risque de ne pas être familier pour celles et ceux d’entre vous qui ne suivent pas de près l’actualité italienne, car il s’agit d’un phénomène humoristique difficilement exportable en dehors des frontières trans-alpines. Déjà le pseudo (car l’humoriste s’appelle en réalité Luca Medici) nécessite une bonne connaissance du patois de Bari, dans les Pouilles, pour qu’on en comprenne la signification (je laisse aux plus curieux.euses le goût de la découverte…)

Checco Zalone démarre sa carrière au début des années 2000 dans l’émission télévisée de grand succès Zelig, où il interprète des chansons humoristiques. Au fil du temps, il commence à se spécialiser dans la réécriture des paroles de chansons célèbres. Parfois les interprètes visé.e.s se prennent tellement au jeu qu’il.elle.s acceptent de partager la scène avec l’humoriste pour chanter leur chanson complètement détournée. Cela est arrivé à Laura Pausini et à Jovanotti, parmi les artistes les plus connu.e.s.

Depuis une dizaine d’années, l’humoriste a souhaité passer des sketchs au cinéma. Un succès bluffant l’a submergé, avec des résultats au box-office que peu de films arrivent à atteindre dans une époque comme la nôtre, où le streaming et les séries l’emportent.

Or, il y a tout juste quelques semaines est sorti son cinquième film comme acteur, premier en tant que réalisateur : Tolo Tolo. Comme l’exprime très justement l’intellectuel Christian Raimo, au vu du succès certain de cet énième opus de Checco Zalone, il est pertinent de l’appréhender non seulement en tant que production artistique, mais aussi en tant que phénomène culturel. D’autant plus que le débat autour du film a démarré dès la sortie de la bande-annonce…

Le petit extrait du film s’approprie les codes de la comédie musicale. En chantant à la Adriano Celentano et en détournant le message de L’italiano de Toto Cutugno, le personnage interprété par Checco Zalone évoque la plupart des discours qu’en Italie font la une sur la question migratoire : les immigrés seraient envahissant.e.s, avides d’argent et de sexe.

En effet, cette bande-annonce a attiré l’attention de nombre de personnes qui, en fonction de leur sensibilité politique, y ont vu soit une superbe incarnation de leurs idées, soit à l’inverse la quintessence du racisme. Matteo Salvini a à tel point apprécié cet aperçu du film qu’il en est arrivé à s’exprimer ainsi.

Les avis ont quelque peu changé après la sortie du film : celles et ceux, notamment les citoyen.ne.s d’extrême droite, qui pensaient avoir trouvé en Checco Zalone un allié, ont dû vite faire marche arrière. Les autres ont globalement plutôt apprécié le film où un ton puisant dans la provocation et le politiquement incorrect est mis au service d’un film politique ayant choisi d’aborder LE thème du moment.

Parmi les critiques négatives, certaines pointent le fait que Zalone aurait représenté une Afrique stéréotypée. En ce sens, une réflexion de Giansandro Merli me semble très juste :

“ Zalone non è un creatore di immaginari liberati o decolonizzati, ma uno che gioca coscientemente con l’inconscio profondo della cultura del suo paese per renderlo visibile e ridicolo. Non è poco. ”