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Publié le dimanche, 28 mai 2017 à 21h45

Un roman qui fait scandale

Par Graziana Lucarelli

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Il est assez rare qu’un roman fasse parler en Italie, du moins dans les journaux. Ainsi, pour une fois qu’une œuvre littéraire fait parler d’elle, je ne peux donc pas me dispenser de la présenter. Le livre s’intitule Bruciare tutto (Tout brûler) et est sorti le 13 avril dernier chez l’éditeur Rizzoli. L’auteur est bien connu, Walter Siti a effectivement gagné le célèbre prix Strega en 2013 et est journaliste chez La Repubblica, deuxième journal quotidien le plus vendu. Si le roman a fait autant parler, c’est parce qu’il aborde un des sujets les plus sensibles qu’ils soient : la pédophile au sein de l’Eglise. Celle racontée est l’histoire de don Leo, prêtre auquel on confie le petit Andrea. Les artistes se sont souvent penchés sur la question : récemment le réalisateur Paolo Sorrentino a abordé la question à travers son Young Pope, juste pour citer un exemple. Or, ce qui a l’air de déranger les détracteurs de l’œuvre de Siti ce n’est pas la thématique qui, comme je viens de dire, est assez récurrente, mais plutôt la manière de l’aborder.

Michela Marzano a publié un article dont le titre est déjà très explicite : « La pédophilie comme salut : le roman inacceptable de Walter Siti ». Ce que Marzano n’accepte pas est que Siti puisse, à travers son roman, absoudre ce religieux et, finalement, légitimer l’acte pédophile. À son avis, l’écrivain donne une interprétation faussée et déformée de la personnalité de l’enfant, en attribuant son désespoir au fait que don Leo lui ait refusé une relation sexuelle, et non pas au sentiment d’abandon produit par le départ imminent du prêtre.

Si débat il y a c’est que, bien évidemment, les critiques ne vont pas toutes dans ce même sens. Marco Bazzocchi contextualise Bruciare tutto dans le cadre de l’œuvre littéraire de Siti et il le considère, depuis ce point de vue, tout à fait légitime et appréciable, dans le sens où il n’arrive pas de nulle part, mais il s’inscrit plutôt dans la suite du travail mené par l’écrivain. De plus, le critique estime que le roman a le mérite d’aborder un sujet tabou, sans devoir justifier le fait de « prendre le parti du pédophile ».

Un autre point qui a suscité une grande ambiguïté (ou qui, pour d’autres, est venu alimenter le scandale que le roman se proposait de faire éclater) est l’hommage, en préambule, à don Milani, prêtre catholique et éducateur très connu en Italie, vécu dans les années 50/60. Porteur d’un fort engagement dans le social, don Milani fonda l’école de Barbiana, qui lui permis d’être en contact avec des enfants et des jeunes au quotidien. La dédicace de Siti laisse sous-entendre que don Milani aurait été confronté au même genre de tentation que don Leo… Comme vous pouvez bien comprendre, l’insinuation qu’il lance n’est pas des moindres. Dans cet entretien, l’écrivain en dit plus sur les raisons qui l’ont poussé à oser un tel rapprochement. À vous d’en tirer vos conclusions.