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Publié le dimanche, 5 août 2018 à 15h57

Le prix Strega 2018 a été décerné au roman « La ragazza con la Leica » de Helena Janeczek

Par Chiara Cipollone

Comment se réjouir juste après être devenue la nouvelle élue du prestigieux prix Strega 2018 ? Tout simplement en buvant au goulot quelque gorgées de l’homonyme liqueur l’air satisfait ! C’est ainsi que Helena Janeczek, 72ème lauréate du célèbre prix italien, a fêté sa victoire le 5 juillet 2018 à Rome, tout en mettant fin à quinze années de domination masculine. Son roman, « La ragazza con la Leica », publié chez la maison d’édition Guanda en 2017, raconte une histoire du passé relativement récent : la vie de la photographe de guerre Gerda Taro, morte sur le champ de bataille en Espagne en 1937. Qui est-ce ? son nom et son prénom n’ont pas trop l’air d’être italiens ! Issue de la diaspora européenne de l’après-guerre, Helena Janeczek a écrit il y a quelque temps à propos de ses racines : « d’italien j’ai seulement mon fils, mon passeport et mon codice fiscale » tout en soulignant une identité qui s’est développée à la croisée de langues et de cultures différentes. En effet, Helena Janeczek est née à Munich en 1964 dans une famille juive d’origine polonaise échappée de l’horreur d’Auschwitz ; depuis 1983 elle demeure en Italie (aujourd’hui à Milan) où elle a été naturalisée italienne. Comme Barbara Plümhosel, Eva Tailor, Helga Schneider et bien d’autres écrivains naturalisés italiens, Helena Janeczek a consacré son écriture à une langue « étrangère », différente de sa langue maternelle, l’allemand. Un choix courageux car l’italien est riche d’une grande tradition littéraire, mais à la fois dépourvu d’un vaste marché de l’édition, ce qui décourage les publications. D’après Igiaba Scego, femme écrivain italienne d’origine somalienne, il ne s’agit pas, donc, d’un choix évident parce que ces auteurs-là se trouvent à préférer « un horizon spécifique, une musicalité linguistique, un parcours de vie », à savoir qu’ils se trouvent à faire un choix littéraire et politique en même temps. Bien que ses tous premiers commencements littéraires ont été fait en allemand avec un recueil de poésies intitulé « Ins Freie » (1989), cette femme écrivain italo-germanique s’est lancée, quelques années après, dans la rédaction de romans en italien : « Lezioni di tenebra » (1997, « Traverser les ténèbres »), « Cibo » (2002), « Le rondini di Montecassino » (2010, « Les hirondelles de Montecassino ») et « Bloody cow » (2012). Son dernier ouvrage, « La ragazza con la Leica», raconte la vie de Gerda Taro, compagne de Robert Capa et, comme lui, photographe. Gerda Pohorylle appartenait à une famille de commerçants juifs immigrés de Galicie et ensuite installés en Allemagne aux débuts des années 1900. Suite à l’arrivée au pouvoir d’Hitler la jeune fille décida en 1933 de quitter l’Allemagne pour s’installer à Paris. Ici Gerda, qui changea son nom de famille en Taro, connut un jeune photographe hongrois, Endre Erno, avec lequel elle travailla et entretint une liaison amoureuse. Ce jeune photographe, encore inconnu, n’est autre que le futur Robert Capa dont le personnage fut inventé par Gerda Taro même, qui lança sa carrière. En 1936 elle obtint sa première carte de presse, délivrée par une agence de photos hollandaise, et partit avec son compagnon pour l’Espagne en révolte. Durant des combats près de Madrid la jeune femme fut écrasée par un tank républicain, devenant ainsi la première femme reporter photographe tuée sur le champ de bataille. Son enterrement eut lieu le 1ère aout 1937 au cimetière du Père Lachaise à Paris. L’intérêt de la romancière envers ce personnage féminin a mûri après une rétrospective de ses photos à Milan en 2009 et la lecture d’une biographie qui lui a été dédiée. C’est ainsi que Helena Janeczek n’a pas tardé à se laisser passionner par son histoire et sa personnalité courageuse, frivole et désinvolte, complétement opposée à la sienne. Non seulement, Gerda partage avec Helena les mêmes origines juives-polonaises et, comme elle, Gerda est une femme migrante qui se déplace dans une Europe en crise et au bord du gouffre. Avec ce roman nous sommes, donc, confrontés à une nouvelle littérature migrante capable de mettre en lumière les problèmes contemporains. Certainement, par rapport aux autres pays européens, l’Italie a été tardivement concerné par les problématiques migratoires (à partir seulement des années 90) tout en ayant été pendant longtemps un pays exclusivement d’émigration. Cela a retardé le processus de renouvèlement d’un point de vu culturel et surtout littéraire. Toutefois, à présent l’expérience littéraire de Helena Janeczek et celles d’autres écrivains est le symbole d’un changement vers une société multiculturelle encore toute nouvelle et en devenir dans l’Italie contemporaine.

https://www.internazionale.it/opinione/igiaba-scego/2018/07/06/helena-janeczek-premio-strega

 

https://www.youtube.com/watch?v=mwcRgejCvXc