Interviews

Publié le mercredi, 19 octobre 2011 à 14h38

Alessandro D’Avenia

Par Stefano Palombari

Alessandro D'AveniaNous avons rencontré Alessandro D’Avenia, jeune enseignant de littérature italienne, de passage à Paris pour participer à la Fête du livre et des cultures italiennes 2011. Nous en avons profité pour lui poser quelques questions sur son roman ''Blanche comme le lait, rouge comme le sang.

Comment est née l’idée du livre ?

L’idée du livre est née à Rome pendant une heure de remplacement que j’ai faite. J’étais…

Le Rêveur ?

Non, le rêveur est un personnage qui concentre en lui les meilleurs enseignants que j’ai eus dans ma jeunesse. Tandis que le professeur de religion est inspiré de padre Puglisi (prêtre tué par la Mafia à Palerme en 1993). Il a été assassiné lorsque j’étais au lycée. Je suis de Palerme, et je me suis installé à Rome à 18 ans pour l’université. Depuis 4 ans j’enseigne à Milan.
Le livre est donc né lors de mon premier remplacement. A Rome, j’étais effrayé car jeune, remplaçant et sans expérience. J’étais sûr qu’ils allaient me manger tout cru. J’ai réagi en faisant exactement le contraire de ce que la peur me poussait à faire. J’ai donc fait mon cours. Une heure de cours, en partant de mon expérience personnelle, de mon enthousiasme. Alors je leur ai demandé leurs expériences marquantes et là un garçon de 16 ans m’a raconté l’histoire de cette camarade d’école décédée l’année précédente à cause d’une leucémie foudroyante.
Le roman est né à ce moment-là. Ce n’était pas tellement la mort de la jeune fille, qui a été mon point de départ, mais la transformation que ce drame a opéré sur son camarade, un ado de 16 ans.

Le roman se passe donc à Rome, car on y parle d’un banc public à côté d’un fleuve.

C’est un lieu géographique indéfini. J’y ai rassemblé toutes mes expériences d’enseignant. Il est vrai que le banc public auquel je fais référence est à Rome à côté du Tibre. Cependant l’histoire que je raconte n’est pas particulièrement romaine. Je voulais toucher tous les ados italiens et pourquoi pas aussi des autres pays. Il y deux semaines, j’étais en Russie car le livre est sorti aussi là-bas et les ados russes se reconnaissaient dans les personnages sans difficulté. C’est la chose la plus belle pour moi.

Le titre est très particulier.

Il y a deux raisons à cela. Tout d’abord je suis Sicilien et la Sicile est une terre où tout a des couleurs extrêmes. En outre, on utilise souvent les couleurs pour dires les choses, on parle par le biais des couleurs.
Et puis, les ados craignent le blanc. La haine du blanc est quelque chose que j’ai appris de mes élèves. J’ai découvert que pour la plupart des ados de 15 / 16 ans le blanc était une couleur négative. Peut-être que c’était pareil pour nous à leur âge et que l’on a tout simplement oublié.
Mais il y a aussi le conte d’Italo Calvino qui résume très bien le rapport entre ces deux couleurs ainsi que l’esprit de l’adolescence. Le personnage principal de mon roman, à partir de ce binôme, apprend à accepter toutes les couleurs de la vie.

Quand on parle d’ados, on parle aussi de rapports avec les adultes...

Bien sûr. Le discours général tend à stigmatiser les ados en soulignant leurs excès. Mais les excès sont typiques de cet âge où tout semble possible et où l’on teste ses limites. Stigmatiser n’est pas vraiment la bonne attitude. Comme le personnage principal de mon roman, j’ai découvert mon père en pleine adolescence. Je le voyais comme un ennemi et j’ai découvert avec surprise qu’il savait m’écouter et qu’il comprenait mon état d’âme. Donc mon roman parle d’amour, de mort et de Dieu, trois sujets très importants pour les jeunes de cet âge-là. Je voulais sortir des banalisations de la jeunesse, genre Moccia (Federico Moccia auteur de 3 mètres au-dessus du ciel NdR).

As-tu eu des propositions d’adaptation au cinéma…

Le livre sera adapté au cinéma, le scénario de Fabio Bonifacci et la réalisation de Giulio Manfredonia.

Tu participes à l’écriture du scénario ?

Oui, on est en train de l’achever. Si tout va bien le film sortira fin 2012.

Ton livre a été un énorme succès.

Il a démarré très bien, grâce aussi aux articles. Puis le bouche à oreille a fait que depuis janvier 2010, date de la sortie, il est toujours resté parmi les dix premiers romans des meilleures ventes.

J’imagine que tu dois ton succès surtout aux jeunes.

Oui. D’ailleurs je l’ai présenté dans différentes écoles en Italie et à l’étranger. Ce sont les jeunes qui, après, le font lire à leurs parents.
Je dois ce succès aussi à mes élèves qui l’on lu avant que je ne le propose à un éditeur. Ils m’ont fait différentes remarques sur le style qui pour moi ont été très importantes. Je voulais que mes personnages soient crédibles. Leur langage devait être bien reproduit. C’est pour cela que la lecture de mes élèves a été fondamentale. Ils m’ont beaucoup aidé.