Editopolis

Publié le mardi, 8 septembre 2009 à 00h01

Buongiornopolis

Par Vito Vespucci

Frecce tricolori

Italopolis nait un 8 septembre, discrètement. On y parlera de l'Italie, en français et en italien.

Comme souvent, comme chaque année de fait, on laisse l'Italie pour 2 ou 3 semaines en plein mois d'aout, quand le pays ferme, que la famiglia attaque le grand voyage sur les approximatives autoroutes du bel paese, ou s'entasse dans des trains omnibus qui traversent l'Italie toute entière. Elle est longue la botte, et là approximatifs sont les horaires, couchettes, un point d'eau fonctionnant, si l'on peut considérer "la toilettes", il bagno, comme un oasis dans la fournaise des Chemins de fer italiens. Puis à la fin des vacances il y a la reprise du championnat de calcio. C'est le signal du retour. Trezeguet est toujours à la Juve, il n'y a pas d'ascenseur dans la gare et on ne sait pas à quelle heure on arrivera.

La phrase de l'été 2009 sera je le crois: "''j'aimerais rester dans l'histoire comme étant celui qui a vaincu la mafia''". Elle a été prononcée -évidemment?- par "Berlusconi Silvio", le corrupteur non-imputable, le champion de la médiapolitique. Le même Berlusconi qui, un jour pas si lointain, a partagé l'avis de son bras droit et sénateur Marcello Dell'Utri au sujet de son propre ex-employé: l'homme d'honneur de Cosa Nostra Vittorio Mangano. "Un héros à sa manière". Il n'avait pas parlé, Contre lui ou eux s'entend, même à l'article de la mort...

C'est peut-être pour cela que Salvatore Borsellino n'aime pas la cérémonie d'hommage palermitana du 19 juillet, pour son frère assassiné. « Ils feraient mieux d'aller fleurir la tombe de Mangano. Le voilà leur héros! » me disait-il récemment (une longue interview est en arrivée). Cette année l'État italien n'a même pas daigné assister à cet hommage.

Si le Cavaliere « gagnait ce fantastique combat » (vaincre la mafia), si l'Histoire venait donc écrite ainsi un jour, il faudrait alors en déduire que Cosa Nostra n'a jamais existé. Comme l'omertà ordonne à ses membres et à ses victimes de le de penser. Comme Dell'Utri, actuellement en procès d'appel à Palerme pour "mafia" le déclara aussi un jour lui même.

Italopolis ouvre le jour numéro 8 d'un septembre noir en Italie.

Un pays et des italiens toujours aussi fantasques et fantastiques, les européens les plus « solaires », les plus séduisants, mais un pays en déclin, en proie à ses cauchemars et résurgences fascistes, face à une crise économique monumentale qu'il ne veut ni voir ni accepter, dont il ne veut pas encore mesurer toutes les conséquences, et surtout pas au quotidien... Un pouvoir politique semblant largement corrompu, dépourvu d'opposition, et dont les travaux sont dédiés complètement à la propre survie ainsi qu'à celle de son chef, avatar de la première république.

Les médias sont muselés, les rares voix s'élevant sont réduites au statut de « délinquants » par le pouvoir en place, qui comprend aussi bonne partie de la gauche. Mais si, mais si... pas la "résistance", attenzione, mais "la gauche".

On y parlera beaucoup de politique et de société, du Vatican et de la mafia, d'affaires italiennes qui souvent ne sont plus des mystères, mais ne peuvent encore aujourd'hui trouver sentence.

Pour mieux comprendre ce sentiment, vous pouvez par exemple visionner l'exceptionnel documentaire « L'Orchestre Noir » (1997). Vous vous sentirez un vrai petit agent secret, assis sur une bombe d'information -et ce n'est pas un vilain jeu de mots... Et pourtant... tout le monde le sait... ou pourrait... ou peut le savoir.

Et puis se dit-on... Où ailleurs qu'en Italie pourrait-on bien trouver deux japonais en ballade avec __134.000.000.000 de dollars?__ Oui vous avez bien lu: 134 milliards de dollars. Par cette saisie, l'État italien pourrait gagner 38 milliards d'euros! Mais il faudrait d'abord qu'on comprenne un peu mieux la nature de la relation de ces deux hommes avec un certain Alessandro Santi, leur contact italien. Peut-être aussi pour cela « rien ne bouge »... Ça m'a rappelé le personnage Flavio Carboni, sarde de tous les coups fourrés... (voir ou revoir I banchieri di Dio si besoin: l'affaire Calvi & co).

Le premier semestre 2009, croulant sous les paillettes des scandales, a finalement été surtout celui du terrible séisme de L'Aquila, et des fêtes en "G" (8, 20...) qui ne servent à rien (le shopping?) sinon réprimer plus et mieux (ou créer la mort d'un passant, vous en souvenez vous à Londres?).

Mais aussi de l'information bâillonnée et de grands mouvements de troupes dans la "résistance" anti-berlusconienne. Ils aboutiront d'ici quelques jours à la création d'un journal, "Il Fatto Quotidiano" (Antonio Padellaro et Marco Travaglio), et même d'un parti politique par le populaire Beppe Grillo. Il aura un nom limpide: Le Mouvement de Libération Nationale.

On se penchera aussi sur l'arrivée prochaine du nucléaire "made in France", nucléaire que le pays avait rejeté par référendum, et l'on se demande:"Mais... le gouvernement français est-il conscient qu'il pourrait ainsi offrir le marché des déchets radioactifs à la criminalité organisée italienne? En mesure-t-il les conséquences?".

On se rappellera la catastrophe du train de Viareggio, funeste métaphore du pouvoir italien en voyage à toute berzingue, fonçant à l'aveugle sans respecter aucun avertissement, empli de substances toxiques, pouvant exploser à tous moments.

Avec impatience nous attendons le résultat des enquêtes de Mr Rossini à L'Aquila, promis il y a des mois pour... "septembre 2009", et suivrons la situation sur place, bien loin d'être résolue comme martelé pourtant par le Cavaliere.

On essayera aussi, et c'est très présomptueux, de comprendre pourquoi on en est arrivé là, ou tout du moins... où en est-on!

Nous sommes tous des indépendants curieux, et en apprendrons autant que vous au fil de nos publications. Vos commentaires sont souhaités. Vous pouvez également nous contacter et proposer vos propres articles.

Le contenu de certains "billets" vous estomaquera certainement. Peut-être donc simplement parce les faits évoqués sont souvent disponibles à tous en Italie, et que les Italiens sont les mieux placés à pouvoir les comprendre, juger, apprécier. Mais ces affaires, en l'état -ou plutôt en l'État- ne semblent intéresser, ou en tout cas scandaliser, plus personne. Sinon les avocats-députés de Berlusconi Silvio. De fait, ils semblent être les seuls employés à plein-temps de la deuxième république italienne.

Au fait, quelqu'un a vu le petit agenda rouge de Paolo Borsellino?



Daje, allez... commençons donc ce Italopolis sans tarder...

Vito Vespucci -Italopolis- 08-09-2009